Episode 3: La Chaussure (suite et fin)

Chers lecteurs, je tiens à vous présenter mes excuses pour la longue absence… J’ai été très occupée ces derniers temps et je n’ai pas eu beaucoup de temps pour vous raconter la suite de mes chroniques. Ceci étant j’ai profité (est-ce bien le terme adéquat ?) de cette longue absence pour vivre pleines de mésaventures que je raconterai dans les prochains épisodes de ma vie de poisseuse. Mais  il y a une histoire que j’avais commencé à vous raconter et que je dois terminer : la chaussure.

Rappelez-vous dans la première partie de cet épisode j’étais en compagnie de potes chez Georges tout se passait bien jusqu’à ce que cette peste de Medjo ne me fasse avoir la honte de ma vie. Tout ça parce que je m’étais entêtée à mettre cette ballerine, ma préférée mais la seule aussi qui me faisait puer des pieds.

Ceci étant, ce jour là (le jour où je me suis décidée à porter ces chaussures et que je vous ai raconté la première partie de ma mésaventure) j’étais persuadée que quelque chose de vilain allait m’arriver.

Je n’aurais pas du porter cette chaussure.

Je venais de prendre le taxi que je regrettais déjà d’avoir mis cette chaussure. Il faut dire que la honte subie récemment à cause d’elle était encore présente. Le trajet était long qui me menait de la maison jusqu’à l’école. Le trajet était d’autant plus long car je stressais ce jour là. En effet, il y a quelques semaines de cela, j’avais eu à passer mes examens et je dois vous dire que je les avais complètement foirés. Et c’était ma dernière chance, les examens de rattrapage comme on les appelle dans le jargon estudiantin. Autant vous dire que si je ratais mes exams j’allais reprendre mon année et cette perspective ne me réjouissais guère (qui veut être Ducobu ? Qui ?)

Je n’aurais pas du porter cette chaussure.

Tous les éléments de la nature étaient d’ailleurs contre moi ce jour là je dis bien tous : d’abord j’avais mes règles (pour mes lecteurs du sexe masculin il faut savoir qu’avoir ses règles c’est un véritable enfer), ensuite je souffrais d’affreux maux de ventre qui me pourrissaient la journée, il faisait hyper chaud et ces embouteillages n’en finissaient ! Tout allait vraiment de travers cette journée là.

Je n’aurais pas du porter cette chaussure.

J’arrivai enfin devant l’université. Une boule d’angoisse se forma dans mon ventre. Je marchais d’un pas rapide et déséquilibré. Plusieurs fois je faillis trébucher, j’avais l’impression que la distance qui me séparait du mur où l’on affichait les résultats augmentait au fil des pas. Après une dizaine de minutes, j’étais enfin devant le « mur » une bonne centaine de personnes obstruaient la voie.

Les visages des gens étaient tristes, peu de personnes étaient joyeuses. Certaines filles pleuraient même. Mais je ne reconnaissais pas de visage connu. J’essayai tant bien que mal de me frayer un chemin dans la foule et arrivai enfin devant le « mur ». Je jetai d’abord un coup d’œil rapide. Je n’y voyais pas clair, ma vision était floue. Le stress qui gagnait mon corps à ce moment là était d’une telle d’intensité que je suffoquai presque.

Je n’aurais pas du porter cette chaussure.

J’essayai de me calmer et de tempérer ma respiration. Après quelques secondes je pu à nouveau regarder le « mur ». Les listes étaient interminables. Psychologie, sociologie, linguistique, espagnol…

Il n’y avait pas les listes de ma filière. Nos résultats n’étaient donc pas encore disponibles. Je sortis un « ouf » de soulagement et retournai à l’arrière, à la recherche d’une place où m’asseoir.

Je trouvai une place sur un banc public qui faisait justement face au fameux « mur ». Une fille à la mine déboussolée serrait son classeur contre sa poitrine. Les gens ne cessaient d’aller et venir. J’entendais des bribes de conversation ici et là : des « le babillard a frappé fort le tour-ci » (le « babillard » c’est le nom que l’on donne à l’espace réservé à l’affichage des résultats des les universités dans mon pays, et on dit qu’il a « frappé fort » lorsque les résultats étaient vraiment mauvais) « il n’a pas réussi, le pauvre, ça va faire trois ans il est dans la même classe ».

L’ambiance n’était pas des plus joyeuses sur le campus cet après-midi là. Et mon stress ne faisait que monter épisodiquement. De temps en temps, mon cœur battait plus rapidement. Même si Gladis essayait tant bien que mal de me faire positiver par sms, je ne cessai de craindre le pire : ne pas réussir à mes examens et reprendre mon année.

Je n’aurais pas du porter cette chaussure.

Plus le temps passait, plus je reconnaissais des visages dans la foule. Mes camarades arrivaient par petits groupes pour attendre les résultats. La fille à coté de moi finit par se lever et se mit à marcher d’un pas lent et nonchalant. Je la regardais marcher jusqu’à ce qu’elle disparaisse peu à peu de mon champs visuel et ne devienne qu’un petit point parmi d’autres.

A 18h03, je vis des membres de l’administration universitaire s’approcher avec de grands papiers blancs.

Je me levai soudainement. Mon cœur battait a tout rompre tandis qu’ils collaient les grandes feuilles sur le mur. Je m’approchai. Rapidement, la foule se forma à coté de moi. J’entendais les premiers cris de joie.

Mandeng…

Manga…

Massaga…

Mbarga…

Mbarga…

Mbatsogo…

M…

Je retrouvai mon nom.  Rapidement, j’essayai tant bien que mal de déchiffrer les résultats qui s’affichaient dans la ligne et qui correspondaient aux notes que j’avais obtenues. Étonnamment, ils étaient plutôt bons, excellents même je dois dire. J’avais réussi à tous mes examens. Un torrent de joie me submergea. J’avais réussi. R E U S S I.

J’appelai rapidement Gladis. Je suffoquai tellement, que j’arrivai à peine à lui transmettre le message.

La nuit avait vite fait de tomber sur la ville. Il était 18h22 quand je me retrouvai au portail du campus. Je longeais lentement le trottoir. La rue était plutôt déserte pour cette heure. J’étais tellement heureuse, je ne m’attendais pas à de si bons résultats.

Tandis que je marchais lentement en savourant ma réussite, une moto roulant à vive allure passa à mes cotés. Le passager arracha violemment mon sac à main que je tenais à la main droite. Ce qui eut pour effet de me faire tomber. Je cognai mon genou droit sur le sol caillouteux.

Je n’aurais vraiment pas du porter cette chaussure.

En mettant cette chaussure le matin, une petite voix intérieure me disait que quelque chose de vilain m’arriverait.  Et quelque chose de vilain m’était arrivée. Je venais de me faire arracher mon sac. Je n’avais donc plus mon porte feuille et mon téléphone portable. Mais j’avais  réussi à mes examens, c’était déjà quelque chose.

 

Ps : Rappelez-moi de ne vraiment plus jamais porter cette chaussure.

Un commentaire Ajouter un commentaire

  1. Anastasie D. dit :

    Ooooo j’espère que tu l’a balancé plus tard.

    J’aime

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