-Mais qu’est ce qu’il fait là avec Yolande, s’était exclamée Constantine. Logiquement c’était à moi de lui poser la question mais elle paraissait tout aussi surprise que moi. Je restais silencieuse et me contentai de soulever les épaules.
– Il m’avait pourtant fait comprendre que quitter Yolande avait été l’une des décisions les plus sages qu’il avait eu à prendre au cours de sa vie, avait continué Constantine.
– Pas si sage que ça apparemment, puisqu’il est avec elle en ce moment, avais-je finis par déclarer.
Subitement, ma pizza avait un gout amer. C’est avec beaucoup de difficultés que je finis la part que j’avais entamé quelques secondes auparavant. Pour tout dire j’étais un peu dégoûtée, ce n’est pas que j’étais amoureuse de Georges à en crever ou amoureuse de lui tout court mais pour une fois depuis des lustres j’avais enfin pu sentir une véritable connexion avec quelqu’un il fallait que ça se termine avant même d’avoir commencé. Au revoir couple heureux-bonheur à deux-gentil et sexy Georges. Notre attention se porta alors sur les serveuses qui faisaient des va et vient entre les tables avec les commandes des clients.
Et puis même pourquoi est-ce que je me mettais dans des états pareils ? Georges n’avait aucun engagement envers moi, théoriquement il ne faisait rien de mal.
D’accord-partie tacite, nous n’avons plus abordé le sujet Georges. Et toute la soirée, j’ai évité de me retourner pour voir ce qui se passait derrière moi, Constantine quant à elle leur jetait furtivement quelques regards de temps en temps.
-Comment va Medjo ? Avais-je finis par demander à Constantine pour rompre le silence qui s’était installé à notre table.
-Elle va bien fit celle-ci en avalant une bouchée de pizza. Elle a soutenu son mémoire de master la semaine passée, elle a d’ailleurs obtenu la mention « très bien ».
A l’annonce de cette nouvelle, je grimaçai et dis ensuite :
-Je suppose qu’elle est égale à elle-même. Peste un jour, peste pour toujours.
Constantine ne répondit pas et se contenta de boire une gorgée de coca. Quant à moi cela me fit sourire, ça fait toujours du bien de dire du mal des personnes qu’on n’aime pas.
Peu à peu, la gêne et le silence qui s’étaient installés à notre table disparurent pour laisser place à la bonne humeur. Constantine me conta un voyage qu’elle avait fait récemment à Ebolowa une ville au Sud du pays. Elle disait avoir visité un centre touristique dans un village périphérique et m’assurait que je devais également tenter l’expérience. Constantine était une personne très spontanée, le genre de personne capable de partir à l’autre bout de la terre sur un coup de tête à 4 heures du matin avec pour seuls bagages sa brosse à dents et deux t-shirts de rechange. Ce caractère était quelque chose que j’admirais chez elle. Moi, j’étais son opposé, j’aimais prévoir, noter les choses dans mon agendas, avoir des plans.
Un autre groupe d’amis entra dans la pièce et prit la place occupée quelques temps avant par le groupe bruyant derrière moi.
Même si j’avais repris du poil de la bête, je n’avais plus tout à fait le même appétit qu’à mon arrivée dans la pizzeria. Aussi, demandai-je à la serveuse de mettre ma pizza à emporter quand Constantine avala la dernière bouchée de la sienne. Il était 21h20 quand nous nous levâmes pour nous diriger vers la sortie. Je ne manquai pas de jeter un dernier regard à Georges qui avait encore baissé les yeux, la fille quant à elle continuait d’étaler les marques d’affection.
Constantine habitait Eleveur et moi la cité verte, deux destinations diamétralement opposées. Nous nous séparâmes donc aussitôt sorties du restaurant et je n’eu pas de peine à trouver un taxi qui me ramena rapidement chez moi.
Dans le petit vestibule, j’ôtai mes chaussures et me débarrassai de mon sac avant de me diriger vers le séjour où je déposai mes restes de pizzas sur la table basse avant de vider la bouteille de vin blanc de papa et de m’installer enfin sur le canapé. J’appuyai sur le bouton on/off de la télécommande avant d’appuyer sur « play ». Les images de Mary Jane défilèrent sur l’écran et eurent pour effet direct de me mettre de bonne humeur. Tandis que l’écran du téléviseur me renvoyait des images, je me mis à penser à Michel. Je l’avais rembarré comme un malpropre et cela me faisait culpabiliser. Vous savez je ne suis pas le genre de personne à avoir la conscience tranquille lorsque je sais que j’ai causé du tort à quelqu’un même si, comme c’était le cas dans l’espèce, la personne le méritait.
C’est ma mère qui me fit me rendre compte que je m’étais endormie sur le canapé. Mon père était derrière elle, il transportait un sac qui avait l’air assez lourd.
-Vas aider ton frère à transporter les provisions fit celle-ci en guise de salutations.
Je n’étais pas encore complètement sortie de ma torpeur. Je me redressai, mon frère apparut portant deux gros régimes de bananes-plantains et se dirigea vers la cuisine d’où il sortit quelques temps plus tard. Je regardai l’horloge en face de moi, il était 5h23. Pourquoi étaient-ils rentrés aussitôt ? Après tout nous étions dimanche et ils auraient pu prendre leur temps. Je me levai enfin et allai à l’extérieur de la maison où mon frère m’attendait adossé sur le tout terrain de mon père. Le jour se levait à peine et il faisait froid à l’extérieur. Ensemble nous transportâmes un lourd sac d’ignames jusqu’à la cuisine. Je finis par aller dans ma chambre où je m’affalai sur mon lit avant de sombrer dans le sommeil.
Moi qui pensait que j’allais passer un long weekend tranquille celui-ci avait été plutôt agité. Pour sûr mon dimanche se devait d’être plus calme. Et il fut en effet assez calme. A mon réveil, je me contentai de faire la cuisine, la lessive et passai le reste de la journée à bavarder par sms avec Constantine et Gladys.
Lundi matin je me réveillai de bonne heure, allai dans la salle d’eau où je lavai mes dents. Les moustiques avaient visiblement fait de mon visage leur terrain de jeu pendant la nuit, mon visage était parsemé de gros boutons. Je pris une douche rapide, me vêtis d’une jupe fluide longueur midi et d’une chemise, mangeai rapidement une tartine avant de m’engouffrer dans un taxi. Il était 7h25 quand je pénétrai dans les locaux d’e-media. L’agence était vide, j’étais la première personne à arriver. J’époussetai mon bureau avant de m’y installer. Je regardais autour de moi et réalisais quelle chance j’avais d’avoir pu décrocher ce stage. C’était le résultat d’un heureux hasard que je vous conterai un de ces quatre.
Sur les murs, de grosses affiches publicitaires rappelaient quelques-unes des campagnes publicitaires que l’agence avait réalisées. Une jeune fille pénétra dans la pièce, c’était Christine, une stagiaire. Christine était une jolie fille, elle avait un teint clair (dans le langage familier camerounais on aurait dit qu’elle est « brune ») de gros seins ronds, des fesses biens rebondies, des hanches larges. C’était une fille qui avait un style assez sexy, des tenues courtes et moulantes. A vrai dire je trouvais que ce n’était pas des tenues pour aller travailler, mais ça plaisait visiblement à la gente masculine de l’agence.
Ce jour-là cependant, elle avait mis une robe droite plutôt élégante. Elle murmura un « bonjour » avant de s’installer à son bureau qui était face au mien et qui n’était séparé du mien que par une sorte de fine cloison en verre. Elle et moi avions commencé le stage le même jour cependant il y avait comme des tensions entre nous. Je ne sais pas pourquoi mais j’avais la certitude qu’elle ne m’appréciait pas beaucoup, notre condition similaire de stagiaire aurait pourtant dû nous rapprocher mais ce n’était pas le cas.
J’allai sur Facebook, je n’avais pas eu de nouvelles de la part de Georges depuis samedi et j’étais bien décidée à mener ma petite enquête. Sur une photo sur laquelle il était en compagnie de sa « moitié Yolande », elle était identifiée. Je cliquai sur le lien d’identification qui m’amena sur son profil. J’appris qu’elle travaillait chez Orange, qu’elle habitait douala et qu’elle avait étudié à l’université de douala. Ses albums étaient également bourrés de photos de gens, probablement des gens de sa famille. Des frères, des tantes, ses parents, et de nombreux neveux de tout âge. Il y avait peu de photos avec Georges et les plus récentes dataient de janvier 2016.
Peu à peu, les employés de la boite arrivèrent et je fermai ma page Facebook. Ce n’était pas bon pour moi de jouer aux espionnes de la sorte, il fallait que je sois une stagiaire exemplaire et ce n’est pas en passant toute la journée sur Facebook qu’on allait me confier d’avantage de responsabilités. L’autre stagiaire en face de moi raccrocha son téléphone lorsque le patron, un jeune homme dans la quarantaine, la définition même du jeune cadre dynamique (notez que j’ai des étoiles dans les yeux quand je le décris) qui portait toujours des costumes sur mesure, sentait super bon et sentait la réussite professionnelle à plein nez, arriva. Quand le patron arriva donc, tout le monde donna l’air d’être terriblement affairé. Cet homme avait un de ces auras !
Quelques temps après son arrivée, son assistante personnelle, une femme qui aurait pu être ma mère vint me trouver à mon box. C’était une petite femme menue, qui mâchait des shewing-gums à longueur de journée. De sa voix nasillarde, elle déclara sans toute autre forme de procès :
-C’est toi Samantha M. la nouvelle stagiaire ?
-Oui c’est moi fis-je inquiète en lâchant la souris de mon ordinateur de bureau.
-Bien, monsieur Etamé demande à te voir.
Je n’eus pas le temps de lui demander à quel sujet est-ce que j’étais demandée qu’elle avait déjà tourné les talons.
Je me levai avec une boule d’inquiétude dans le ventre. Le ton avec lequel la dame m’avait parlé quelques secondes plus tôt n’avait rien de rassurant. D’un pas stressé, je me dirigeai vers son bureau, Christine – ma collègue stagiaire- ne manqua pas de me toiser à mon passage.
Je n’eus pas le temps de toquer que son assistante personnelle sortit de son bureau, j’entrai alors. Il faisait un froid de canard dans le bureau, ça n’arrangeait rien à l’ambiance glaciale qui y régnait.
Depuis que j’avais commencé mon stage, je n’avais pas encore eu l’occasion de lui adresser la parole. Il avait toujours l’air super occupé, ne restait jamais à son bureau au moment de la pause, était très souvent en réunion ou au téléphone ou bien passait et repassait en coup de vent. Plantée là au milieu de son bureau, lui étant au téléphone et moi debout les bras joints en arrière, je ne cessais de me demander pourquoi est-ce qu’il m’avait fait venir. Je dois avouer qu’il était très différent de celui que j’avais rencontré quelques semaines plus tôt et qui m’avait demandé de déposer ma candidature. Je ne savais pas ce qui m’attendait et mon sixième sens me disait que rien de bon n’allait se passer dans ce bureau. Rien.
Après une ou deux minutes qui eurent l’air d’une éternité pour moi, il raccrocha enfin son téléphone et prit un air sérieux avant de déclarer:
-Il faut qu’on parle vous et moi.
Je ne sais pas pour vous mais moi j’ai toujours eu l’impression que cette phrase avait des airs de sentence.
A suivre
😍😍je wait la suite ohhh!
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LA SUITE C’EST POUR QUAND?
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